Les directives de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) recommandent
une instauration précoce des traitements antirétroviraux (ART), abstraction
faite du taux de CD4, chez tous les patients atteints de tuberculose et
HIV-positifs simultanément ; toutefois, les données permettant de soutenir
cette approche sont de qualité contestable. Nous avons étudié l’incidence du
calendrier d’instauration d’une ART sur les résultats du traitement contre la
tuberculose chez des patients HIV-positifs avec une numération de CD4 de 220
cellules par μl ou plus.
Nous avons
réalisé cette étude randomisée et contrôlée par placebo entre le 1er
janvier 2008 et le 31 avril 2013, dans 26 centres de traitements situés en
Afrique du Sud, Tanzanie, Ouganda et Zambie. Nous avons recruté des patients
positifs au HIV, atteints de tuberculose confirmée par culture et ayant bien supporté
une courte chimiothérapie de deux semaines contre la tuberculose. Les patients
ont été répartis de manière aléatoire (1:1) pour recevoir ART en administration
précoce (initiée après deux semaines de traitement contre la tuberculose) ou
ART en administration tardive (placebo, puis initiation d’ART à l’issue des six
mois de traitement contre la tuberculose). La randomisation a été générée par
ordinateur, en blocs de huit, et stratifiée selon la numération CD4 (220-349
cellules par μl versus >= 350
cellules par μl). Ni les patients ni les investigateurs n’avaient accès au
tableau de randomisation jusqu’à terminaison des six mois de traitement contre
la tuberculose, après quoi l’étude était rendue ouverte. Le critère principal
mesuré était la résultante de l’échec du traitement contre la tuberculose, la
rechute de la tuberculose, et la mort dans les 12 mois suivant l’instauration
du traitement contre la tuberculose, au sein de la population en intention de
traiter modifiée. Les critères d’évaluation secondaires comprenait
notamment le taux de mortalité. (…).
Nous avons sélectionné
13 588 patients et en avons recruté 1 675 : 834 ont reçu le traitement
ART d’instauration précoce, et 841 le traitement ART d’instauration tardive. Le
critère principal d’évaluation était atteint par 65 (8.5%) des 767 patients du
groupe ART d’instauration précoce versus
71 (9.2%) des 771 patients du groupe ART d’instauration tardive (ratio de
risque relatif [RR] 0.91, Intervalle de Confiance -IC- 95% 0.64-1.30 ;
p=0.9). Des patients avec numération CD4 de 220-349 cellules par μl, 26 (7.9%)
sur 331 versus 33 (9.6%) sur 342 ont
atteint le critère principal d’évaluation (RR 0.80, IC 95% 0.46-1.39 ;
p=0.6). Pour les patients avec numération CD4 de 350 cellules par μl ou plus,
39 (8.9%) sur 436 versus 38 (8.9%)
sur 429 ont atteint le critère principal d’évaluation (RR 1.01, IC 95%
0.63-1.62 ; p=0.4). Le taux de mortalité n’a pas montré de différence
significative entre les groupes de traitement (RR 1.4, IC 95% 0.8-2.3 ;
p=0.23). Des évènements indésirables de grade 3 et de grade 4 sont survenus
chez 149 (18%) des 834 patients sous ART d’instauration précoce versus 174 (21%) des 841 patients sous
ART tardive (p=0.37). 87 (10%) des 834 patients ART précoce versus 84 (10%) des 841 patients ART
tardive ont montré un syndrome de reconstitution immunitaire (p=0.56).
De fait, l’instauration
d’une ART peut être repoussée jusqu’à terminaison d’un traitement de 6 mois
contre la tuberculose chez les patients HIV-positifs, atteints de tuberculose
et qui montrent une numération CD4 supérieure à 220 cellules par μl. Les
directives de l’OMS devraient être donc mises à jour dans ce sens. Sayoki G
Mfinanga PhD et al, dans The Lancet
Infectious Diseases, publication en ligne en avant – première, 6 mai 2014
Financement :
USAID, Ministère de la Santé de Zambie, Commission pour la Science et la
Technologie de Tanzanie, WHO-TDR
Source : The Lancet Online / Traduction et
adaptation : NZ
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