Il n'existe que peu de données disponibles à propos du rôle du choix
du patient et des politiques de concurrence entre les hôpitaux sur le
fonctionnement des services de chirurgie du cancer. De précédentes études ont
montré que les patients sont prêts à négliger la prise en considération du
centre de chirurgie du cancer le plus proche de leur domicile pour
recourir à un centre de chirurgie du cancer plus éloigné, dans le but de
satisfaire à leurs besoins. Dans cette étude nationale de population, nous
avons poursuivi des investigations sur l’effet de la mobilité du patient et de
la concurrence entre les hôpitaux sur la configuration du service et de l’adoption
de technologies au sein du National Health Service en Angleterre, utilisant la
chirurgie du cancer de la prostate comme modèle.
Nous avons cartographié tous les patients basés en
Angleterre ayant subi une prostatectomie radicale entre le 1er
janvier 2010 et le 31 décembre 2014, selon leur domicile et le lieu du
traitement. Pour chaque centre de prostatectomie totale, nous avons analysé l’effet
de la concurrence entre les hôpitaux (mesurée à l’aide de l’Indice de Pression Spatiale Concurrentielle [SCI] ; un score égal à 0 indiquant la concurrence
la plus faible et un score égal à 1 indiquant la plus forte concurrence) et l’effet
de satisfaire à la définition de centre de prostatectomie radicale robotisée au
début de l’année 2010 sur le gain ou la perte en patients admis pour chirurgie
(différence entre nombre de patients traités dans un centre et effectif attendu
sur la base de leur résidence), et la probabilité de fermeture de leur service
de prostatectomie radicale.
Entre le 1er janvier 2010 et le 31
décembre 2014, 19 256 patients ont subi une prostatectomie radicale dans
un centre relevant du NHS en Angleterre. Sur les 65 centres de prostatectomie
radicale ouverts au début de la période d’étude, 23 (35%) centres ont présenté
un gain net en patients significatif au cours des années 2010-2014. Dix (40%) centres
sur les 23 précédemment évoqués étaient des centres robotisés établis. 37 (57%)
centres sur les 65 ont présenté une perte nette en patients significative, dont
deux (5%) d’entre eux étaient des centres robotisés établis et dix (27%) ont
fermé leur service de prostatectomie radicale au cours de la période de l’étude.
Les centres de prostatectomie radicale ayant fermé étaient localisés plus
souvent dans les zones de plus forte concurrence (quartile de SCI le plus élevé
[0.87-0.92] ; p=0.0081) que
dans les zones de plus faible concurrence. Aucun centre de chirurgie robotisé n’a
fermé indépendamment de la perte nette de patients. Le nombre de centres de
chirurgie robotisée a augmenté au cours de cette période, passant de 12 (18%) centres
robotisés sur un total de 65 centres recensés au début de 2010 à 39 (71%)
centres robotisés sur 55 centres recensés à la fin de 2014.
Les facteurs de concurrence - outre les politiques
de soutien à la centralisation et à l’exigence d’un minimum d’actes
chirurgicaux - ont contribué à l’investissement à grande échelle en équipements
de chirurgie robotisée sans preuve de meilleurs résultats, et à la fermeture d’unités de chirurgie du cancer. Si la performance en termes de qualité des soins et
autres indicateurs ne sont pas accessibles aux patients pour guider leurs
choix, ces politiques pourraient menacer la capacité des services de santé à
prodiguer des soins équitables et accessibles aux malades du cancer. Dr Ajay
Aggarwal, MD, et al, dans The Lancet Oncology, publication en ligne en
avant-première, 3 octobre 2017
Financement :
National Institute for Health Research