Leucémie Myéloïde Aigüe dans la moëlle osseuse. Source: https://commons.wikimedia.org/wiki/File:AML-M0.jpg |
Les patients âgés (âge ≥ 65 ans), atteints de
leucémie myéloïde aigüe, présentent un mauvais pronostic ; et il n’existe aucune
norme en matière de thérapie de cette pathologie. Les traitements à base de d’agents
hypométhylants comme l’azacitidine et la décitabine sont communs, mais la
réponse à ces traitements est faible et de courte durée. L’inhibiteur de la
protéine 2 anti-apoptose, le venetoclax, a montré une activité prometteuse en
tant médicament administré seul chez des patients atteints de leucémie myéloïde
aigüe récidivante ou réfractaire et des données précliniques suggèrent qu'une
synergie s'établit entre les agents hypométhylants et le venetoclax, menant à cette étude
de combinaison de phase 1b.
Des patients âgés de 65 ans ou plus, n’ayant reçu
aucun traitement au préalable, atteints de leucémie myéloïde aigüe, qui étaient
non éligibles pour administration d’un traitement d’induction standard, ont été
recrutés dans cette étude de phase 1b. Les patients devaient présenter un statut
de rendement ECOG de 0-2 et un risque cytogénétique faible ou intermédiaire.
Les patients ont été recrutés dans l’un des trois groupes de cette étude d’augmentation
de dose : groupe A (venetoclax et decitabine à raison de 20 mg/m2
[jours 1 à 5 de chaque cycle de 28 jours]), groupe B (venetoclax et azacitidine
75 mg/m2 par voie sous-cutanée ou intraveineuse [jours 1 à 7 de chaque
cycle de 28 jours]), et groupe C (sous-étude venetoclax – decitabine avec inhibiteur
CYP3A posaconazole – deux fois 300 mg administré per os au cours du cycle 1, au jour
21, et 300 mg une fois par jour au cours du cycle 1, du jour 22 au jour 28,
afin d’évaluer son effet sur la pharmacocinétique du venetoclax). L’augmentation
de dose a été réalisée selon un schéma standard 3+3 avec recrutement d’au moins
trois patients évaluables par cohorte ; les doses de venetoclax administrées
quotidiennement dans les groupes A et B étaient de 400 mg (cohorte 1), 800 mg
(cohorte 2 et 3), et 1 200 mg (cohorte 4), et 400 mg pour le groupe C. Les
critères principaux de l’étude étaient l’innocuité et la
pharmacocinétique du [venetoclax + (decitabine ou azatacidine)], ainsi que la dose maximale tolérée à recommander pour une étude de phase
2. Les critères secondaires d’évaluation comprenaient l’activité
antileucémique préliminaire du venetoclax avec decitabine ou azacitidine par l’analyse
de la réponse globale aux traitements, la durée de la réponse, et la survie
globale.
Nous avons analysé l’innocuité, la pharmacocinétique, et l’activité anti-leucémique
chez tous les patients qui avaient reçu une ou plusieurs doses de venetoclax. L’étude
est toujours en cours, mais les inclusions en sont terminées. (…).
57 patients ont été recrutés dans cette étude. Les 23
patients du groupe A et les 22 patients du groupe B ont été recrutés
entre le 19 novembre 2014 et le 15 décembre 2015, et les 12 patients du groupe
C ont été recrutés entre le 14 juin 2015 et le 16 janvier 2016. A la tombée des
données en date du 15 juin 2016, les événements indésirables de grade 3-4 apparus
au moment des traitements étaient thrombocytopénie, (27 [47%] patients sur 57 ;
neuf dans le groupe A, dix dans le groupe B et trois dans le groupe C), et
neutropénie fébrile (24 [40%] patients sur 57 ; onze dans le groupe A, dix
dans le groupe B, et trois dans le groupe C).
Les événements indésirables
graves apparus au moment des traitements les plus fréquemment rencontrés dans
le groupe A et le groupe B étaient neutropénie fébrile (sept [30%] patients sur
23 versus sept [32%] patients sur
22), alors que dans le groupe C, l'événement indésirable grave le plus fréquemment relevé était infection pulmonaire (quatre [33%] patients sur 12).
49 (86%) patients sur 57
présentaient des événements indésirables liés aux traitements ; les plus
communément rencontrés dans les groupes A et B incluaient nausée (12 [52%]
patients versus sept (32%] patients),
fatigue (six [26%] patients versus
sept [32%]) et numération diminuée des neutrophiles (six [26%] patients versus
six [27%]), alors que dans le groupe C, les plus communs étaient nausée (sept
[58%] patients sur 12), leucopénie (six [50%]), vomissements (cinq [42%]), et
diminution de la numération des plaquettes (cinq [42%]).
La dose maximale
tolérable n’a pas été atteinte. La dose à recommander pour étude de phase 2
était 400 mg une fois par jour ou 800 mg avec une interruption du programme de
dosage (extension de la phase d’évaluation de l’innocuité). Au total, quatre
(7%) patients sur 57 sont décédés dans les 30 jours suivant l’administration
de la première dose de venetoclax, causée par une septicémie (groupe B), bactérémie
(groupe A), une infection pulmonaire (groupe C) et une insuffisance
respiratoire (groupe A). Aucun syndrome de lyse tumorale n’était observé. La
decitabine et l’azacitidine n’ont pas affecté l’exposition au venetoclax. Dans
l’ensemble, 35 (61% ; Intervalle de Confiance [IC] 95% 47.6-74.0) patients
sur 57 ont obtenu une rémission complète ou une rémission complète avec récupération
incomplète de la moëlle osseuse. Dans les groupes A et B, 27 (60% ; IC 95%
44.3-74.3) patients sur 45 ont présenté une rémission complète ou une rémission
complète avec récupération incomplète de la moëlle osseuse.
Le traitement venetoclax + agent hypométhylant
semble présenter un nouveau type de traitement avec activité prometteuse dans
cette population défavorisée de patients. L’évaluation des cohortes d’expansion
est toujours en cours à des doses de 400 mg et 800 mg utilisant les deux combinaisons
d’agents hypométhylants. Courtney D DiNardo, MD, et al, dans The Lancet Oncology,
publication en ligne en avant-première, 12 janvier 2018
Financement : Abbvie et Genentech