Mélanome au Pied Gauche. Source: https://commons.wikimedia.org/wiki/File:WB032021.JPG |
La double inhibition BRAF et MEK produit une
réponse chez un nombre élevé de patients atteints d’un mélanome de stade IV à
mutation BRAF. La norme de soins
existante chez les patients atteints d’un mélanome de stade clinique III est la
chirurgie en première intention et les dispositions permettant d’envisager une
thérapie adjuvante ; ce qui se révèle insuffisant pour soigner la plupart
des patients. La thérapie néoadjuvante à
base d’inhibiteurs de BRAF et de MEK (comme par exemple le dabrafenib et le
trametinib) pourrait apporter un bénéfice clinique auprès de cette population à
haut risque.
Nous avons effectué cet essai monocentrique randomisé
en ouvert de phase 2 au Centre Médical M. D. Anderson de l’Université du Texas
(Houston, TX, USA). Les participants éligibles étaient des patients adultes
(âge ≥ 18 ans), atteints mélanome résécable de stade III histologiquement ou
cytologiquement confirmé ou d’un mélanome oligométastatique de stade IV porteur
de mutation BRAFV600E ou BRAFV600K (c’est-à-dire muté
Val600Glu ou Val600Lys). Les patients éligibles devaient présenter un statut de
rendement ECOG (Eastern Cooperative Oncology Group) de 0 ou 1, une espérance de
vie supérieure à 3 ans ; ils devaient en outre ne jamais avoir été exposés
à des inhibiteurs de BRAF ou de MEK.
Les critères d’exclusion de l’étude comprenaient métastases osseuses, métastases cérébrales, ou métastases au niveau d’autres sites où la faisabilité d’une excision complète
par chirurgie serait douteuse.
Nous avons réparti les patients de manière
aléatoire (1:2) dans le Groupe 1 : Groupe chirurgie de première intention +
dispositions permettant d’envisager une thérapie néoadjuvante (Groupe Norme de
Soins) ou dans le Groupe 2 :
Groupe Thérapie néoadjuvante + traitement dabrafenib per os et trametinib per os (administration
de dabrafenib 150 mg deux fois par jour pendant et de trametinib 2 mg par jour
pendant 8 semaines suivi d’une chirurgie, puis traitement dabrafenib +
trametinib en adjuvant commençant une semaine après la chirurgie sur une durée maximale
de 44 semaines pour une durée totale de traitement de 52 semaines). La
randomisation, assurée par le centre où l’essai avait lieu, était effectuée en
ouvert (…). Les patients étaient stratifiés par stade de la maladie. Le critère
principal de l’étude était la survie sans nouvel événement - évaluation par l’investigateur
- (c’est-à-dire les patients vivants sans progression de la maladie) à 12 mois
dans la population en intention de traiter (…).
Entre le 23 octobre 2014 et le 13 avril 2016, nous
avons réparti de manière aléatoire 21 patients au total : sept patients
ont reçu la norme de soins et 14 patients ont reçu la thérapie néoadjuvante +
dabrafenib et trametinib en adjuvant. L’essai a été interrompu peu après l’analyse
intermédiaire d’innocuité planifiée à l’avance qui est intervenue à la suite de
la constatation qu’un quart des participants recrutés présentaient une survie
sans récidive significativement plus élevée sous thérapie néoadjuvante +
dabrafenib et trametinib en adjuvant que sous norme de traitement.
Après une période médiane de suivi de 18.6 mois,
(Intervalle Interquartile [IQR] 14.6-23.1), un nombre significativement plus élevé
de patients recevant le traitement néoadjuvant + dabrafenib et trametinib en
adjuvant étaient vivants sans progression de la maladie que ceux recevant la norme
de traitement (dix [71%] patients sur 14 versus aucun patient sur sept dans le
groupe norme de traitement ; la médiane de survie sans événement était de
19.7 mois [de 16.2 à non estimable) versus
2.9 mois [Intervalle de Confiance -IC- 95% de 1.7 à non estimable] ;
hazard ratio 0.016, IC 95% 0.00012-0.14, p<0.0001).
Le traitement néoadjuvant + dabrafenib
et trametinib en adjuvant ont été bien tolérés, sans survenue d’événements
indésirables graves de grade 4 ou de décès liés aux traitements. Les événements
indésirables les plus communément rencontrés dans le groupe traitement
néoadjuvant + dabrafenib et trametinib en adjuvant étaient des toxicités de
grade 1-2 incluant des frissons (12 patients [92%]), céphalées (12 [92%]), et pyrexie
(dix [77%]). L’événement indésirable de
grade 3 le plus fréquent était diarrhée (deux patients [15%]).
Le traitement néoadjuvant + dabrafenib et
trametinib versus norme de traitement
a sigificativement augmenté la survie sans événement chez des patients atteints
de mélanome résécable à haut risque de stade clinique III-IV. Bien que l’essai ait
été prématurément interrompu, limitant une interprétation globale des
résultats; ceux-ci représentent en eux-mêmes une preuve de concept et
soutiennent le principe d’une poursuite des investigations sur les approches
néoadjuvantes ce cette maladie. Le recrutement de patients se poursuit
actuellement, pour cet essai, dans le cadre d’une étude à simple bras sur dabrafenib
et trametinib en néoadjuvant et adjuvant. Rodabe N Amaria, MD, et al, dans The
Lancet Oncology, publication en ligne en avant-première, 17 janvier 2018
Financement :
Novartis Pharmaceutical Corporation