Les essais randomisés contrôlés par placebo ont montré qu’une prophylaxie préexposition
per os (PrEP) avec tenofovir-emtricitabine réduit le risque d’infection au VIH.
Cependant, le bénéfice tiré pourrait être contrebalancé par la compensation du
risque chez les sujets sous PrEP. Nous avons effectué l’étude PROUD dans le but
d’évaluer cet effet.
PROUD est un essai randomisé en ouvert réalisé dans 13 cliniques de santé
sexuelle en Angleterre. Nous avons recruté des homosexuels VIH-négatifs ainsi
que d’autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, ayant
pratiqué la sodomie sans préservatif au cours des 90 jours précédant la visite de recrutement.
Les participants ont été répartis de manière aléatoire (1:1) pour recevoir quotidiennement
du tenofovir disoproxil fumarate (245 mg) et de l’emtricitabine (200 mg) soit
immédiatement, soit à l’issue d’une période de report de un an. La
randomisation a été effectuée à l’aide d’une liste par blocs de dimension
variable (stratifiés par site clinique) centralisée, générée par ordinateur et
accessible sur internet. Le suivi était effectué quatre fois par an. Les critères
principaux d’évaluation pour la phase pilote était le temps nécessaire à la
réalisation du recrutement de 500 participants et leur maintien dans l’étude ;
les critères secondaires d’évaluation de l’étude incluaient les cas incidents d’infection
à VIH au cours de la période de report, la sécurité de l’essai, l’adhésion au
traitement, et la compensation du risque. (…).
Nous avons recruté 544 participants (275 dans le groupe traitement
immédiat, et 269 dans le groupe traitement reporté) entre le 29 novembre 2012
et le 30 avril 2014. Sur la base d’évidences d’efficacité, le comité directeur
de l’étude a émis, en date du 13 octobre 2014, la recommandation selon laquelle
un traitement PrEP soit offert de fait à tous les participants du groupe
traitement reporté. Le suivi pour ce qui est de l’incidence du VIH était
complet pour 243 (94%) des 259 patients-années dans le groupe traitement
immédiat versus 222 (90%) des 245 patients-années du groupe traitement reporté.
Trois infections VIH sont survenues dans le groupe traitement immédiat (1.2/100
personnes-années) versus 20 dans le groupe traitement reporté (9.0/100 personne-année)
malgré 174 prescriptions de prophylaxie post-exposition dans le groupe
traitement reporté (diminution relative 86%, Intervalle de Confiance [IC] 90% 64-96,
p=0.0001 ; différence absolue
7.8/100 personnes-années, IC 90% 4.3-11.3). 13 hommes (IC 90% 9-23) provenant d’une
population similaire nécessiteraient un accès au traitement PrEP pour une durée
de un an pour éviter une infection au VIH.
Nous n’avons enregistré aucun évènement indésirable grave impliquant les
produits à l’étude ; 28 évènements indésirables, le plus souvent des
nausées, maux de tête, arthralgie, qui ont eu pour effet l’interruption du
traitement PrEP. Nous n’avons détecté aucune différence intergroupe d’occurrence
d’infections transmises par voie sexuelle, gonorrhée rectale et chlamydia
incluses, malgré un risque de compensation du risque suggéré parmi les
bénéficiaires du traitement PrEP.
Dans cette population à haute incidence, l’administration quotidienne de
tenofovir-emtricitabine a conféré une protection plus élevée contre le VIH que
celle notée dans les études contrôlées par placebo, réfutant ce faisant les inquiétudes
selon lesquelles l’efficacité serait moindre dans un contexte réel. Aucune
évidence d’augmentation de fréquence d’autres infections sexuellement
transmissibles n’a été relevée. Nos résultats soutiennent fermement l’adjonction
du traitement PrEP aux standards de prévention chez les hommes entretenant des
relations sexuelles avec d’autres hommes avec risque d’infection par le VIH. Prof
Sheena McCormack, MSc, et al, dans The Lancet, publication en ligne en
avant-première, 9 septembre 2015
Financement: MRC Clinical Trials Unit à l’UCL, Public Health
England, et Gilead Sciences.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire