Carcinome à cellules squameuses de l'oesophage. Source iconographique: https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Esophageal_squamous_cell_carcinoma_-_a1_--_high_mag.jpg |
Les conjugués d’anticorps-médicament apparaissent comme une stratégie efficace dans la thérapie du cancer, et combinent la capacité des anticorps monoclonaux à cibler spécifiquement les cellules
tumorales avec des médicaments à forte capacité destructrice mais dont les
doses utiles sont trop toxiques pour une administration par voie systémique. Le
trastuzumab deruxtecan (appelé également DS-8201) est un conjugué d’anticorps-médicament
composé d’un anticorps humanisé contre HER2, un groupe clivable par un enzyme,
et un inhibiteur puissant de la topoisomérase I. Nous avons évalué son
innocuité et sa tolérance chez des patients atteints de tumeurs du sein et de l’estomac
ou de tumeurs oeso-gastriques avancées.
C’était un essai ouvert d’augmentation de dose de
phase I effectué dans deux sites d’études au Japon. Les patients éligibles
avaient âgés d’au moins 20 ans, atteints de carcinomes du sein, de l’estomac,
ou de la jonction oeso-gastrique réfractaires aux thérapies standard,
abstraction faite de leur statut HER2. Les participants ont reçu des doses
initiales de trastuzumab deruxtecan par voie intraveineuse, s’échelonnant de
0.8 à 8.0 mg/kg, les toxicités doses-limitantes étant évaluées sur un cycle
de 21 jours. Par la suite, les réductions de doses administrées
étaient mises en place selon les besoins et les patients recevaient leur
médicament une fois toutes les 3 semaines jusqu’à ce qu’ils ressentent des
effets toxiques intolérables ou jusqu'à ce que leur maladie progresse. Les critères
principaux de l’étude incluaient l’identification de l’innocuité et de la dose
maximale tolérable ou de la dose recommandable pour application en étude de
phase 2 ; l'analyse était effectuée chez tous les participants qui
avaient reçu au moins une dose du médicament à l’étude. Cette étude d’augmentation
de dose représente la première partie d’une étude, dont la deuxième phase dite
d’expansion est en cours et en recrutement de patients à partir du 8 juillet
2017, au Japon et aux États-Unis d’Amérique. (…).
Entre le 28 août 2015 et le 26 août 2016, 24
patients ont été recrutés et ont reçu le trastuzumab deruxtecan (n=3 pour
chaque dose de 0.8, 1.6, 3.2, et 8.0 mg/kg ; n=6 pour chacune des doses de
5.4 et 6.4 mg/kg). Jusqu’à la date de clôture de la base de données en date du
1er février 2017, aucun effet toxique limitant la dose, effet
toxique cardiovasculaire notoire, ou de décès, n’est survenu. Un patient a été
retiré de l’analyse d’activité du fait d’une insuffisance de lésions cibles
pour analyse. Les événements indésirables de grade 3 les plus courants étaient
diminution des lymphocytes (n=3) et des neutrophiles (n=2) ; une anémie de
grade 4 a par ailleurs été rapportée par un patient. Dans l’ensemble, sur 23 patients
évaluables incluant six patients présentant des tumeurs à faible expression de
HER2, dix patients ont obtenu une réponse objective (43%, Intervalle de
Confiance [IC] 23.2-65.5). Le contrôle de la maladie était réalisé chez 21 patients
(91% ; IC 95% 72.0-98.9) sur 23. La période médiane de suivi était de 6.7
mois (Intervalle Interquartile - IQR - 4.4-10.2), avec neuf réponses (90%) sur
dix obtenues à des doses de 5.4 mg/kg ou plus.
La dose maximale tolérable de trastuzumab
deruxtecan n’a pas été atteinte. Dans cette petite étude de population, dont
les sujets ont déjà reçu de la chimiothérapie intensive, le trastuzumab
deruxtecan a montré une activité antitumorale, même chez des patients dont les
tumeurs n’exprimaient HER2 que faiblement. Sur la base de l’innocuité et de l’activité observées ici,
la dose à recommander pour essai de phase 2 est de 5.4 ou 6.4 mg/kg. Dr
Toshihiko Doi, MD, et al, dans The Lancet Oncology, publication en ligne en
avant-première, 13 octobre 2017
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