Tomographie par contraste de phase d'une grossesse de 37 semaines. Source: https://en.wikipedia.org/wiki/Medical_imaging_in_pregnancy |
Un retard de croissance fœtale intra-utérin peut
mener à toute une série d’issues indésirables, incluant la mort fœtale ou
néonatale, un handicap neurologique, et des risques à vie sur la santé de l’enfant
affecté. Le sildenafil, un inhibiteur de la phosphodiesterase de type 5,
potentialise les effets de l’oxyde nitrique, ce qui conduit à une
vasodilatation des vaisseaux utérins et qui pourrait améliorer la croissance fœtale
in utero.
Nous avons réalisé cet essai de supériorité,
randomisé et contrôlé par placebo dans 19 unités de médecine foeto-maternelle
au Royaume-Uni. Nous avons utilisé un logiciel de répartition par ordinateur
(1:1) pour affecter les femmes avec une grossesse monofoetale entre 22 semaines
et 0 jours de gestation et 29 semaines et 6 jours de gestation, présentant un
retard sévère de croissance fœtale intra-utérin; pour recevoir soit le
sildenafil 25 mg trois fois par jour ou le placebo jusqu’à 32 semaines et 0
jours de gestation ou jusqu’à l’accouchement. Nous avons stratifié les femmes
par site et par âge gestationnel au moment de la randomisation (avant la
semaine 26 et 0 jour ou à la semaine 26 et 0 jour). Nous avons défini le retard
de croissance fœtale intra-utérin comme la combinaison du poids fœtal exprimé ou
la circonférence abdominale inférieure au 10ème percentile et d’un flux
sanguin absent ou inversé en fin de diastole dans l’artère ombilicale selon la
vélocimétrie mesurée par Doppler. Le critère d’évaluation principal était la
période de temps écoulée entre la randomisation et l’accouchement. (…).
Entre le 21 novembre 2014 et le 6 juillet 2016,
nous avons recruté 135 femmes et avons réparti de manière aléatoire 70 femmes pour
recevoir le sildenafil et 65 femmes pour recevoir le placebo. Nous n’avons
trouvé aucune différence d’intervalle de temps médian entre la randomisation et
l’accouchement chez les femmes aléatoirement désignées pour recevoir le
sildenafil (17 jours [Intervalle Interquartile IQR 7-24] ) et les femmes
aléatoirement désignées pour recevoir le placebo (18 jours [8-28] ; p=0.23).
Les naissances vivantes (Risque Relatif [RR] 1.06, Intervalle de Confiance [IC]
95% de 0.84 à 1.33 ; p=0.62), les morts fœtales (0.89, de 0.54 à 1.45 ;
p=0.64), les morts néonatales (1.33, de 0.54 à 3.28 ; p=0.53), et le poids à
la naissance (-14g, de -100 à 126 ; p=0.81) n’ont pas différé entre les
groupes. Par ailleurs, aucune différence intergroupe n’était décelée pour aucun
autre critère d’évaluation secondaire. Huit événements indésirables graves ont
été rapportés au cours de l’étude (six dans le groupe placebo et deux dans le
groupe sildenafil) ; aucun de ces événements n’a été imputable au
sildenafil.
Le sildenafil n’a ni prolongé la période de
grossesse, ni amélioré les résultats de grossesse dans les cas de retard de
croissance fœtale intra-utérin précoce ; ainsi, s'il ne doit par conséquent pas être
prescrit à visée thérapeutique, on peut toutefois poursuivre des études sur le
sildenafil dans un cadre de recherche clinique avec le consentement explicite des
participants. Andrew Sharp, PhD, et al, dans The Lancet Child & Adolescent
Health, publication en ligne en avant-première, 6 décembre 2017
Financement : National Institute of Health Research et Medical Research Council