Les patients atteints de cancer squameux de l’oropharynx
et positifs pour le papillomavirus humain (HPV) présentent un taux de survie
élevé lorsqu’ils sont traités par radiothérapie plus cisplatine. La question de
savoir si le remplacement de la cisplatine par le cetuximab – un anticorps
contre le récepteur de croissance épidermique – peut préserver un taux élevé de
survie tout en réduisant la toxicité, reste sans réponse. Nous avons poursuivi
des investigations afin de définir si le cetuximab pouvait maintenir une
proportion élevée de patients survivants et réduire les toxicités aigüe et
tardive.
Le RTOG 1016 est un essai de non-infériorité
randomisé, multicentrique, réalisé au niveau de 182 centres de santé aux États-Unis
et au Canada. Les critères d’éligibilité comprenaient la présence d’un
carcinome de l’oropharynx histologiquement confirmé HPV-positif ; de
catégories cliniques T1-T2, N2a-N3 M0 ou T3-T4, N0-N3 M0 selon la 7ème
édition de l’American Joint Committee sur le Cancer ; un statut de
rendement Zubrod de 0 ou 1 ; et présentant des fonctions médullaires,
hépatiques et rénales adéquates. Nous avons réparti les patients de manière
aléatoire (1:1) pour recevoir [radiothérapie + cetuximab] ou [radiothérapie + cisplatine]. Un équilibrage de la randomisation
était réalisé à l’aide de la technique de permutations de blocs, et les
patients étaient stratifiés selon leur catégorie T (T1-T2 versus T3-T4), leur catégorie N (N0-N2a versus N2b-N3), leur statut
de rendement Zubrod (0 versus 1), et
leur historique de tabagisme (≤ 10 paquets-années versus > 10
paquets-années). Les patients étaient assignés à recevoir le cetuximab par voie
intraveineuse à une dose de charge de 400 mg/m2 par semaine, sept
fois (total= 2 150 mg/m2), ou la cisplatine 100 mg/m2
aux jours 1 et 22 de la radiothérapie (total=200 mg/m2). Tous les
patients ont reçu un traitement accéléré de radiothérapie à modulation d’intensité
à délivrée à raison de 70 Gy en 35 fractions sur 6 semaines, à raisons de six
fractions par semaine (avec deux fractions données sur une journée, à au moins
6 heures d’intervalle. Le critère principal était la survie globale, définie à
partir de la randomisation jusqu’au décès quelle qu’en soit la cause, avec une
marge de non-infériorité de 1.45. L’analyse principale était réalisée sur la
population en intention de traiter, où tous les patients satisfaisant aux
critères d’éligibilité étaient inclus. (…).
Entre le 9 juin 2011 et le 31 juillet 2014, 987 patients
ont été recrutés ; 849 d’entre eux étaient assignés pour recevoir soit [radiothérapie
+ cetuximab (n=425)] soit [radiothérapie + cisplatine (n=424)]. 399 patients
assignés au traitement cetuximab et 406 patients assignés au traitement
cisplatine étaient éligibles pour analyse par la suite. À la suite d’un suivi d’une
durée médiane de 4.5 ans, la radiothérapie + cetuximab n’a pas satisfait aux
critères de non – infériorité, s’agissant de la survie globale (hazard ratio
[HR] 1.45, limite supérieure de l’Intervalle de Confiance unilatéral [IC] 95% 1.94 ;
p=0.5056 pour la non-infériorité ;
valeur unilatérale au test de Mantel – Haenzel de p=0.0163). La survie globale à 5 ans était de 77.9% (IC 95%
73.4-82.5) dans le groupe cetuximab versus
84.6% dans le groupe cisplatine (80.6-88.6). La survie sans progression de la
maladie était significativement plus basse dans le groupe cetuximab en comparaison
du groupe cisplatine (HR 1.72, IC 95% 1.29-2.29 ; p=0.0002 ; survie sans progression à 5 ans 67.3% ; IC 95%
62.4-72.2 versus 78.4%, 73.8-83.0),
et l’échec des traitements sur le plan locorégional était significativement
plus élevé dans le groupe cetuximab que dans le groupe cisplatine (HR 2.05, IC
95% 1.35-3.10 ; taux à 5 ans 17.3%, IC 95% 13.7-21.4 versus 9.9%, 6.9-13.6). Les taux de toxicité aigüe modérée à sévère
(77.4%, IC 95% 73.0-81.5 versus
81.7%, 77.5-85.3 ; p=0.1586) et
de toxicité tardive modérée à sévère (16.5%, IC 95% 12.9-20.7 versus 20.4%,
16.4-24.8 ; p=0.1904) étaient
similaires entre les groupe cetuximab et cisplatine.
Chez les patients atteints de carcinome de l’oropharynx
HPV-positif, le traitement [radiothérapie + cetuximab] a produit une survie globale
et une survie sans progression de la maladie inférieures à celles observées chez
les patients recevant [radiothérapie + cisplatine]. [Radiothérapie +
cisplatine] représente donc le traitement standard chez les patients atteints
de carcinome de l’oropharynx HPV-positifs, éligibles. Prof. Maura L. Gillison,
MD, et al, dans The Lancet,
publication en ligne en avant-première, 15 novembre 2018
Financement :
National Cancer Institute USA, Eli Lilly, et The Oral Cancer Foundation
Source iconographique, légendaire et rédactionnelle : The Lancet Online
Traduction
et adaptation : NZ
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire